Hommage à Pierre Perrault 2009

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dimanche, mars 8 2009

Hommage à Pierre Perrault Rouen 2009, premier billet

Bienvenue sur le blog "Hommage à Pierre Perrault Rouen 2009".

Ce blog vous propose des informations sur la journée : le programme mis à jour ; des indications pour vous rendre à Mont-Saint-Aignan ; les textes qui vous permettront de préparer le marathon de lecture et la liste des participants à cette lecture.

Il est organisé en "billets";

Premier billet : le programme, les indications pratiques.

Deuxième billet : les textes choisis pour le marathon de lecture.

Troisième billet : la liste des participants au marathon de lecture et les textes qu'ils liront.



Le programme :

Hommage à Pierre Perrault,  poète de l’Extrême-Nord

Rouen, le 25 mars 2009

« et je dis  neige pour en faire de vieux os », Gélivures.

L’Institut Pluridisciplinaire d’Etudes Canadiennes de l’université de Rouen organise le 25 mars 2009, de 9h30 à 18h30, un hommage à Pierre Perrault, cinéaste-poète décédé en 1999. Dix ans après la mort de l’écrivain, on fera le bilan d’une œuvre riche et diverse et l’on s’interrogera sur la façon dont les générations actuelles peuvent l’accueillir. La journée sera tout particulièrement dédiée à un aspect moins connu de l’œuvre : la poésie. Dans un souci de diffusion, la journée associera donc approche critique et lectures de l’oeuvre, présentation d’extraits de films. On abordera notamment la question du Nord et du territoire, que l’œuvre de Pierre Perrault développe entre les années 1970 et les années 1990.

L’exposition de photographies présentée vous sera proposée grâce à l’aimable contribution de l’ayant droit Mme Yolande Simard-Perrault et du Centre culturel Notre-Dame-de-Grâce de Montréal, dirigé par Luk Côté (elle sera en place du 19 au 29 mars 2009).

La journée de Rouen est associée à l’hommage à Pierre Perrault organisé par l’Association Internationale des Etudes Québécoises, qui aura lieu à Montréal les mardi 19 et mercredi 20 mai 2009.

Lieu : Maison de l’Université, campus de Mont-Saint-Aignan.

9h30 : Accueil des participants, salle d’exposition de la Maison de l’Université. Collation offerte par l'IPEC.

10h-11h : Mot de bienvenue, par Cécile Fouache, co-responsable de l’IPEC.

Inauguration d’une exposition de photographies de Pierre Perrault, « Pierre Perrault, photographe. Au pays de Neufve-France / 1957-58 », en présence de Jean Labrie, Directeur adjoint aux Programmes académiques internationaux (Éducation internationale et jeunesse, Ministère des Affaires étrangères et du Commerce international du Canada), de Cafer Ozkül, Président de l’Université, de Marie-Claude Penloup, Doyen de la Faculté des Lettres et d’Orietta Doucet-Mugnier, Directrice des relations universitaires et de la mobilité étudiante (Ambassade du Canada), salle d'exposition de l'université.

Présentation d’un stand de livres, par Florence Davaille (IPEC), en collaboration avec la Librairie du Québec à Paris et la Librairie Colbert à Mont-Saint-Aignan. Annonce de la parution de divers ouvrages concernant Perrault, notamment le livre Cornouailles, hommage à Pierre Perrault, collection « Jardin de givre » du Laboratoire international d'étude multidisciplinaire comparée des représentations du Nord de l’UQAM, éd. P.U.Q., avant-dire de Yolande-Simard Perrault, introduction et appareil critique de Florence Davaille.

11h-12h30 : Table ronde « Et toujours pour la suite du monde : Pierre Perrault et l’héritage qu’il nous laisse », salle divisible Sud. Modérateur : Jack Warwick (IPEC).

Amorce : portrait de Pierre Perrault, film de 3 min. réalisé par Philippe Pilard (1996).

Participants : Michel Marie, professeur à l’université de Paris III ; Marie-Hélène Fraïssé, journaliste (France-Culture, GEO) et écrivain ; Marie-Pierre Duhamel-Müller, membre du comité de sélection de la Mostra de Cinéma de Venise ; Guy Gauthier, critique et écrivain de cinéma. Philippe Pilard, cinéaste.

12h30-14h : déjeuner offert par l'IPEC, restaurant Emile Blondel.

14h – 16h30 : Marathon de lecture / débat : « La poésie de Pierre Perrault», salle divisible Sud. Modératrice : Florence Davaille.

Après le marathon « Corneille », le marathon « Flaubert », venez participer à la lecture publique de l’œuvre d’un auteur québécois. Pour préparer ces lectures, on se reportera, à partir du 25 février, au blog « Hommage à Pierre Perrault Rouen 2009 », soit à partir du site de l’université de Rouen : www.univ-rouen.fr, soit directement à l’adresse : http://perrault2009.blog.free.fr (aide à la réalisation technique : Maxime Angot).

Des pièces musicales écrites sur des poèmes de Pierre Perrault seront entendues à cette occasion.

16h30-17h00 : pause

17h00-18h30. Extraits de films / débat, salle divisible Sud : « Nord et territoire chez Pierre Perrault : du documentaire au film-poème .» Modératrice : Cécile Fouache (IPEC).

- Gwenn Scheppler (Université de Lyon 2 / Université de Montréal, doctorant): « Le projet "Baie James" et ses aléas : exploration du lien entre le cinéma de Pierre Perrault et les réalités du Québec ». Extrait du Pays de la terre sans arbre, ou le Mouchouânipi.

- Florence Davaille (IPEC) « Poésie et écriture cinématographique : une ultime vision du Nord dans l’œuvre de Pierre Perrault. » Extrait de Cornouailles.

- Clôture:  Dans la vallée de Sverdrup (1991), montage inédit de Stéphane Drelet et Denis Villeneuve (19’).

Mot de conclusion : Yolande Simard-Perrault.

Manifestation organisée avec le concours du Gouvernement Canadien, de l’Association Internationale des Etudes Québécoises et de l'ERIAC, centre de recherche de l'Université de Rouen.

Informations pratiques :

Pour accéder au campus de Mont-Saint-Aignan : à partir de la gare de Rouen, bus n°4 (en face de la gare), arrêt Place Colbert (en face de la librairie Colbert), puis prendre à gauche et remonter la rue, puis la rue toujours à gauche au milieu du campus. Après l’arrêt du bus TEOR, la Maison de l’université est à gauche, au centre du campus de la Faculté des Lettres.

A partir de Paris : train SNCF au départ de la Gare Saint-Lazare jusqu'à la gare "Rouen Rive droite", durée du trajet : une heure quinze approximativement.

Contact : Florence Davaille ; 06 74 25 05 93 ; davaille.florence@orange.fr

Le marathon de lecture

Qu'est-ce qu'un "marathon de lecture "?

C'est une lecture publique menée en continu par les lecteurs eux-mêmes, intéressés par ce partage en commun d'une oeuvre et cette reconstitution d'une "communauté de lecteurs" propice aux échanges.

Le "marathon Perrault" sera le troisième marathon de lecture organisé par l'Université de Rouen. Après "Corneille", après "Flaubert", un auteur francophone pourra ainsi être lu / relu en public et son oeuvre diffusée.

On lira tout particulièrement la poésie de Pierre Perrault. En effet, pour de nombreux écricains, la poésie est un art de la voix. Le poème n'est pas seulement à lire dans l'intimité d'une conscience et le plaisir de la mise en page visuelle. Il est à murmurer, à proférer : il est écrit, comme le disait Jules Supervielle, pour la "vie vocale ".

Afin d'aider les lecteurs qui souhaitent participer à ce programme à préparer leur intervention, un certain nombre de textes sont proposés dans le deuxième "billet".

Les lectures seront espacées de moments propices aux commentaires ou à la discussion. Certains participants ont déjà prévu de lire quelques inédits. Vous pouvez proposer vous-même un texte à lire.

Si vous souhaitez participer, contactez-moi par courriel, à l'adresse davaille.florence@orange.fr pour que je puisse construire progressivement une liste de participants et une progression assurant la cohérence de la lecture. Cette synthèse sera visible progressivement sur le blog dans le troisième "billet".

samedi, mars 7 2009

Deuxième billet : Textes choisis

NOTE : ATTENTION, LA MISE EN PAGE DU POÈME N'EST PAS TOUJOURS ENREGISTRÉE PAR LE BLOG.

CERTAINS TEXTES N'ONT PAS PU ÊTRE PRÉSENTÉS. VOUS TROUVEREZ UNE LISTE COMPLÈTE DES TEXTES QUI POURRONT ÊTRE LUS À LA FIN DU BILLET.

Avant-propos à Chouennes

"Chouennes"

 Au début de ce livre, j'ai voulu placer le mot chouennes pour m'en affubler comme un chasseur de la peau de la bête, et pour les mêmes magies. Pour autant, je n'oserai l'enfermer dans une définition. Qu'il suffise de dire à qui veut entendre qu'il recouvre toutes formes de langage parlé, de la simple vantardise à tout discours habile à "dire des merveilles". Ces sortes de poèmes parlés, qu'on pourrait appeler parlêmes, ont trouvé terre d'élection dans ce pays des gibards, des dauphins blancs, des glaces flottantes et des hommes, situé entre Québec et Blanc-Sablon et y compris îles, récifs, archipels, battures, sablons et mirages. Et les gens de Charlevoix, qui ont inventé un langage sans pareil, ont aussi imaginé ce mot mousquetaire et joualeresque dont les linguistes n'ont pas réussi à démêler la généalogie. Il reste qu'il me convient d'en abuser pour ce qu'il contient de vantardise et pour ce qu'il présage un avenir à une parole qui n'attend rien des hommes de loi pour prendre place au soleil.

Portulan, 1961

L'AUTRE MONDE

Dans la mer des espaces et de la durée je cherche seulement l'endroit où vont échouer mes litanies.

Comment savoir où réside mon rêve de l'homme et s'il est une géographie de la dernière volonté : un lit de justice où dormiront les amours de bronze des bénitiers.

J'ai entendu avec ferveur les légendes innombrables des statues et des marbres, des hauts lieux et des basses pierres de tant de cathédrales

mais je n'ai pas rencontré dans toutes ces églises papales les dieux de tous les hommes sur la colline de toutes les couleurs !

Je cherche le temple sans colonne sans statue, sans peinture, sans grande architecture où un dieu très humble, très bon, très bienveillant, (peut-être pas infiniment) sait mieux ce qu'il veut que ce qu'il ne veut pas (presque humainement).

Je rêve d'un dieu familier avec les autres hommes... et je voudrais pour cette occasion devenir orme de septembre lac de forêt noire tremble du chemin ou bien tout simplement pierre des champs !

BORÉAL

J'ai rencontré une forêt d'invraisemblances.

Toute une forêt d'épinettes blanches,

comme les baleines blanches des vents du large !

Toute une forêt de baleines blanches en forme d'épinette sans même une dent de verdure...

et puis après on dira que rien n'est arrivé !

DU COEUR AU VENTRE

Je te raconte par coeur ! Personne ne te connaît autant que moi ...

Nous avons tant dormi dans les mêmes rêves...

Et devant le paysage de ton corps surprenant j'ai de bonnes raisons de te croire sur parole.

Je regarde grandir l'arbre de tes gestes complaisants et je te raconte les yeux fermés aux branches de tous les vents.

Alors s'apaise la tempête viscérale pas un air de vent... pas un brin de mal

le temps s'imagine qu'il recommence à ton avantage.

PORTULAN

la terre me parut partout ailleurs alors j'ai profondément désiré ce voyage

j'arrive de plus loin qu'on ne pense et ça n'est pas pour en rester là

déserter le bout du monde de ma naissance et les horizons qui doivent arriver

ne rien savoir de mes pas effeuillés puis revenir au premier village par l'autre bout du monde sans reconnaître le clocher

en arriver un jour à croire que la terre n'est pas ronde après l'avoir contournée...

LES GRANDES PÊCHERIES

j’ai vu les poissons passer par les mailles du varech

et les rêves se glisser entre les doigts de l’eau

et les coquillages faux-monnayeurs des risques de la pêche

j’ai vu des vagues dont on ne revient pas

et des vents qui tuent avec l’aile des oiseaux

et les ancres qui rouillent un pied dans les marées

j’ai vu les pêcheurs noirs de peine haler les cordages

et regretter les grandes pêches du temps passé en vain

j’ai vu les poissons passer entre les doigts de l’eau

la mer bien trop grande pour la chance des filets

et quelques hommes au bord des quais parlant de morue avec des gestes de rochers

EN COUPLE À ELLE

dans les herbes à sang froid l’eau des mares jubile une grenouille nubile chante un air des bois

j’ai mis les pailles en croix je vous en fais confidence quand on est jeune on se croit de bons comptes avec la chance

les engoulevents ont bien perdu à ne pas filer la laine il nous restait tant de chemins dans la douceur présente

le vent passe plus bas que l’herbe ma lampe a-t-elle manqué le départ dans les pierres les grillons acerbes chantent qu’il n’est pas trop tard

ta robe froissée de fruits amers nous avons gagné la rivière à rentrer dans la folle danse où j’ai tenu ta main par la hanche

je ne rendrai à personne la rondeur des pommes qu’un soir je dérobai au cœur de tes vergers

mon cœur se trouble troublera saviez-vous que la violette double doublera

Ballades du temps précieux (1963)

OUTARDE

une ligne droite telle une idée fixe dans le corridor étroit des migrations

frappé par un bruit le canard tombe dans l’eau crevée de joncs abandonnant l’enjeu des directions

les soleils aussi tombent dans la nuit des constellations dans l’astrologie le fleuve dans le silence la terre dans les fruits

cependant, haut, très haut, un cri sans amertume disposé en pointe de flèche atteint l’homme inférieur et le dépouille de ses victoires faciles

FROIDURE

les paroles gèlent aussitôt dites et nous en ferons un grand palais de glace

en juin les mots libérés des ruisseaux chercheront ta bouche et mes yeux

le temps qu’on gagne entre le jour le plus étroit et le jour le plus long de l’année rajeunira tous les arbres et nos illusions

nous nous perdons ensemble dans le temps qui nous reste

LABRADOR

je marche sur la pierre nue d’une île

carapace où les pensées sont à venir si lentes que les traits de ce visage ne révèlent pas la conscience

une ride parfois garde une mousse, un lichen, sans espoir de jardin

et le chicouté trouve à fleurir ses orgueils de solitaire

quelques goélands brisent des oursins sur cette table difficile à réussir

mon talon viole une formidable entreprise de silence

et le souffle de la mer s’acharne à informer cette forme sans poumon

pour polir les surfaces jalouses du marbre des statues une bave d’écume pierre ponce de la mer

le nord, ne le cherche pas plus loin que dans ce gel du granit impassible aux dictons sur la lune

fera-t-on enfin quelque chose pour la mémoire d’un coquillage, monnayé par les ailes, qui blanchit sur une île nue

là j’ai échappé aux exigences des migrations sur une île sans nom que je n’ai pas osé tutoyer depuis trois siècles

Toutes isles (1963)

il est tard pour croire aux sirènes (Supervielle)

in III. « Tête à la Baleine » NOMADES DE TERRE ET DE MER

Notre parti pris, c’est l’homme…d’ici (Yves Préfontaine)

« ils sont ambulatoires » (Jacques Cartier)

Que j’énumère leurs voyagements !

Car la pêche qu’ils maudissent parfois ne suffit pas à les nourrir et il faut ajouter…

d’une île à l’autre le chicouté dans une rivière les rets à saumon un rocher pour les œufs d’oiseaux un fond pour le homard une battures pour les « coques » un rigolet pour les « padoues » et une anse pour le bois de grève…

il faut prévoir un « cran » où les canards passent un champ où les outardes se posent une forêt pour le lièvre une savane pour la perdrix blanche et une fonderie pour le loup marin…

il faut entreprendre l’hiver en prévoyant les voyages en « cométique » pour le bois…et les grands voyages en canot sur les rivières pour la fourrure… et les blancs retours en raquette… et quand la viande vient à manquer les courses fabuleuses de huit, dix ou quinze jours jusqu’à la toundra où règne le vent comme un oiseau de proie pour ramener, parfois, un seul caribou déjà entamé par le retour…

il faut encore posséder sur une île lointaine une cabane et un chaudron de fonte et de grands filets pour prendre le loup-marin du Groënland qui passe en décembre…

il faut oser partir au printemps parmi les glaces à la dérive chasser le blanc, blanc loup-marin et parfois ramener une fortune et parfois un naufrage…

Il y a des milles de distance entre chaque repas.

in V. « Nomades du caribou »

ni la ruse, ni l’angoisse ne les rendait à ce point silencieux mais le désir d’entendre

(Rainer Maria Rilke, Sonnets à Orphée)

KA KÉ KI KOU

nomme les choses, ne cesse jamais de nommer les plantes, les pierres, les objets… nomme les êtres…par leur nom, pour savoir qui tu es.

(Jean-Guy Pilon, Recours au pays.)

OLOMANSHIBOU

Et mon pays serait le vôtre ? (Alfred DesRochers)

arrivée

Le bon endroit n’est pas toujours le bon moment…et je récitais les îles !

Trop de surprises tiennent en suspens leur chair sans mollesse pour l’éblouissement de nos désirs d’une grande époque… et je récitais les îles comme un dauphin.

Ce fleuve n’est pas un rêve qu’on fait en dormant. Tant de mer unit et sépare les villages comme autant d’îles. Et tous les mots sont usés faute de vent. Mais parfois un appel de milliers d’oiseaux froissé d’ailes et de cris de chaleur. Un grand cri de mer prolonge la nuit jusqu’au cœur sans motif des vigies. Et je bats à tout rompre tel un cordage tordu par la brume… récitant les îles.

La nuit pourtant ne laisse rien entendre que d’appréhension. Nul espoir de rencontre parmi les fantômes fatigués d’avoir tant servi à tant de livres. Et les sirènes mortes viennent butiner le miel de nos oreilles de cire et la haute voix déclamatoire des fous de Bassan… récitant les îles à compte d’auteur.

Sur ce, de grands feux de mer tournoyant sur la vague, illuminèrent les quatre dieux du vent.

A toute allure nous approchons de ce banquet de sorciers, au large d’îles désertées par tous les esprits lumineux des soleils pourris au cœur des tourbières. Autour d’un monstre noir et blanc et mâts et cordages et palans et nuages d’étoiles accrochées aux drisses, aux ancrages, aux instants et aux feux de forêt boréale, se joue le drame obscur des déchargements.

C’était le même grand navire croisé la veille entre les rives hautaines du Grand Rigolet, et cette nuit accosté à la vague pour le compte d’un village sans quaiage, ni fascinages, ni estacades, ni chafaud de bois.

Un grand événement de mer déployant ses incidents et ses fantasmes. Les projecteurs vont à la vague et reviennent aux visages où brillent les couleurs de l’audace et des frayeurs. Le long du mur noir de sinistre acier les chaloupes blanches et les barges du village indien de la Romaine dansent une danse du feu. Avec des perches et des rires, les hommes repoussent le grand navire.

Les palans et les treuils tuent les éclats de la vague appliquée à entrechoquer les embarcations. Il ne reste que les signes pour diriger la descente des filets pleins de marchandise que les Indiens empressés, amusés, déchargent et arriment dans les chaloupes de la Compagnie de la Baie d’Hudson : encore et toujours la même compagnie occupée à civiliser les fourrures. Parfois tombe à la mer une planche qui flotte maladroite ou un sac qui coule à pic… ; les pertes sont calculées d’avance et prévues dans des prix fixés par les actuaires : c’est l’Indien qui paiera ; cependant il rit.

Travail disproportionné, curieux, grinçant, plein d’éclats, de gestes et de gaucheries : une rencontre inégale, étincelante : je revoyais les trois navires de la découvrance entourée par la curiosité et le surcroît des canots d’écorce.

Presque tous les villages désormais peuvent recevoir à quai les trois navires. Et bientôt ne verrons plus ces merveilleux sabbats des déchargements au quai de la vague et de tous les vents.

La chanson de Marie (1967)

au bout de ce grand bout de terre de peine et de misère dis-moi marie pourquoi le silence s’agrandit

est-ce parce qu’on vieillit

ne dirait-on pas qu’il n’est plus temps

et le temps de tant d’enfance où nous allions sous les branches me revient comme un présent

parce que c’est de vivre pourtant qu’on meurt

après ce beau bout de pommier au bout de ce grand bout de mer bout de chemin bout de misère dis-moi marie est-ce parce qu’on vieillit

tout ce qui nous a surpris ne nous arrivera plus guère au bout de ce grand bout de mer

parce que c’est de vivre pourtant qu’on meurt

j’ai régné par les saisons - le temps nous dure à peine - étions-nous faits pour la chanson avant d’avoir filé la laine

dis-moi marie marie de mes jardins puisqu’on parle de la vie

puisque le temps petit à petit prend la place des murs

puisque l’amour ne vaut pas plus ni moins que ce qu’il dure dis-moi marie marie de toute la terre dis-moi si tu te rappelles

de la neige qui neige sur la neige

et qui nous a tant éblouis presque trop presqu’autant et même que le plus beau de la branche à l’oiseau

parce que c’est de vivre pourtant qu’on meurt

la pomme rouge et la gelée blanche puisqu’on parle de la vie tourmentent le même jour le pommier doux

dis marie mon grand pays au bout de ce grand bout de neige dis ce que tu penses de la terre

de la terre qui reprendra nos visages pour en faire des feuillages aux branches du coudrier

et rien de nous arrivera plus de la vie que nous avons vécue pour que le temps passe

LISTE DES TEXTES QUI SERONT LUS :

(récapitulation)

- « Chouennes », introduction au recueil Chouennes (1975), rassemblant les recueil publiés par Perrault en 1961 et 1971. - « L’autre monde », « Boréal », « Du cœur au ventre », « Portulan », « Les grandes pêcheries », « En couple à elle », poèmes de Portulan (1961) - « Outarde », « Froidure », « Labrador », poèmes de Ballades du temps précieux (1963) - « ils sont ambulatoires », « Olomanshibou, arrivée », extraits de Toutes Isles (1963).

(et aussi)

- trois extraits du «Cantouque des cantouques », poème de En désespoir de cause, février1971. - Epilogue à Option Québec, de René Lévesque, extrait. - « La chanson de Marie », in Chouennes, 1975. - Deux extraits de Gélivures, « Neigeries ». - Deux extraits de Gélivures, « Cornouailles ». - Extrait d’une lettre racontant le voyage sur la côte Nord effectué par Guy Gauthier, Pierre Perrault et leurs épouses. (inédit) - Dédicaces de Pierre Perrault à son épouse, Yolande Simard-Perrault. - Extrait de Jusqu’à plus outre. - Extrait du discours de réception d’un doctorat honoris causa à l’Université de Lyon (inédit). - « La ricaneuse », Irréconciliabules, Le plus que temps, 1995. - Deux extraits de Visage humain d’un fleuve sans estuaire (1998). - « L’imparfait de l’objectif », L’Oumigmatique ou l’objectif documentaire (1995). - Extrait de « La molaire de Dieu », chapitre du Mal du Nord (1999).

mercredi, février 25 2009

Troisième billet : la liste des participants au marathon de lecture

LISTE EN COURS DE CONSTRUCTION

PAR ORDRE ALPHABÉTIQUE :

CECILE BOULEAU : L'autre monde, Olomanshibou

MADELEINE CHANTOISEAU : Extrait de Gélivures

FLORENCE DAVAILLE : Le cantouque des cantouques, Cornouailles, La ricaneuse (duo)

GISÈLE DEBLEDS : Du coeur au ventre, Portulan

MARIE DUPOND : Les grandes pêcheries, En couple à elle.

CECILE FOUACHE : La ricaneuse (duo), visage humain d'un fleuve sans estuaire

GUY GAUTHIER : Discours de réception d'un doctorat honoris causa de l'université de Lyon (inédit).

Extrait du récit d'un voyage sur la Côte Nord (inédit).

MARIE GRAVRAND : La chanson de Marie.

CATHERINE HUMBLOT : Extrait de l'Epilogue à Option Québec de René Lévesque.

JANINE MULOT : Boréal

YOLANDE SIMARD-PERRAULT : Dédicaces (inédit).

YOLANDE SIMARD-PERRAULT ET MURIEL JOFFRE : Extrait de Jusqu'à plus oultre.

MARIE VALLOIS : Chouenne, Outarde, Froidure, Labrador.

JACK WARWICK :Toutes Isles "ils sont ambulatoire" ; Le mal du Nord, La molaire de Dieu.